Guerre de 1914 – Exode

 

Guerre de 1914 – Exode

La Maison hospitalière était complètement organisée
quand éclata la guerre, en août 1914.
En quelques jours, elle fut trans­formée en Hôpital de la Croix-Rouge.
Les religieuses assurèrent le service.

La Mère Sainte Angèle qui, en 1911,
avait succédé à Mère Sainte Véronique,
eut à son tour une lourde croix à porter.

Par son oubli d’elle-même, son courage, son dévouement,
son abandon à la divine Providence,
elle fut durant ces années tragiques, le modèle et le soutien de ses filles.

Dès le 18 septembre, de sept heures à neuf heures du matin,
9 obus de gros calibre tombèrent sur la Maison,
et coûtèrent la vie à 4 religieuses ;
4 autres furent blessées, dont deux gravement mu­tilées.
Le lendemain 19, tandis que la Cathédrale brûlait,

deux reli­gieuses étaient grièvement blessées à l’Orphelinat de Bethléem
qui dut être évacué, et dans quelles pénibles conditions !
 

A la rue du Barbâtre, il devint bientôt impossible de maintenir l’hôpital
dans la Maison entamée de tous côtés et qui dans la zone de feu,
devait subir de si rudes assauts jusqu’à sa destruction complète
par les incendies de 1917 et 1918.

La Communauté ne pouvait demeurer à Reims.
On trouva des toits hospitaliers à Ay, Dizy, Epernay.

 
Photo des Soeurs réfugiées à Ay

A Châlons-sur-Marne, les religieuses de la Congrégation Notre Dame
mirent généreusement une partie de leur monastère
à la disposition de la Communauté et du Noviciat.
Pendant plus de 3 ans, quarante religieuses du Saint Enfant Jésus
bénéficièrent de la fraternelle et bienveillante hospita­lité de Mère Thérèse,
dont le cœur était inépuisable de bonté.

La R. Mère Sainte-Angèie avait mis ses filles à l’abri,
mais elle-même demeura sur la brèche jusqu’à la fin,
avec Sœur Sainte Victorine, Assistante,
et un groupe de vaillantes Sœurs qui, au mépris du danger,
adaptèrent leur apostolat aux besoins présents :
visite des malades ou des vieillards à domicile,
assistance aux mou­rants, soins aux victimes des bombardements.

Dès le 25 septembre 1914, avec les encouragements de son Eminence le Cardinal Luçon

et de Mgr Neveux, supérieur de la Com­munauté,
les religieuses prirent l’initiative d’une œuvre bienfaisante et patriotique :
« L’hygiène du Combattant », vulgairement appelée « Bain de pieds ».

     

Le Couvent du Barbâtre, de plus en plus mutilé,
devint la « Maison de famille du Soldat ».

    
 
Les défenseurs de Reims étaient là chez eux ;
ils y trouvaient à toute heure, avec les soins d’hygiène et de santé,
l’affection et le réconfort moral et religieux qui leur étaient si nécessaires.

Une citation à l’ordre du régiment, en 1915,
une croix de guerre en décembre de la même année,
une part du prix Montyon en 1917, reconnurent les services rendus ;
mais, surtout la reconnaissance des soldats
et celle de leurs familles, après douze ans écoulés,
té­moigne encore de l’œuvre bienfaisante accomplie
par le Couvent du Saint Enfant Jésus.

 

La Maison devait payer de sa ruine l’honneur
d’avoir été si hospitalière à nos combattants.
Le 30 juillet 1917, des obus incen­diaires détruisirent
la chapelle et une partie des bâtiments contigus.

Citons le « Petit Rémois » :

« Le joli clocheton dentelé d’une de nos plus jolies chapelles de la ville,
devenu le point de mire de la rage teutonne, était lundi soir, la proie des flammes.
Pyramide de feu, il apparaissait comme une merveille ajourée,
empourprée par l’embrasement de l’incendie…
Puis la flamme gigantesque, l’en­veloppant dans un linceul de feu,
il s’évanouit en un effondrement léger.

A cette minute tragique, des témoins de ce navrant spectacle
ne pouvaient détacher leurs regards
de cette chapelle à l’ombre de laquelle tant de bien s’était fait.

Les pompiers, accourus en hâte sur le lieu du sinistre,
s’empressèrent d’enrayer l’incendie
qui gagnait à grande allure tout le bâtiment .
Avec un dévouement digne de tout éloge et un admirable sang-froid,
ils purent sauver une grande partie du mobilier d’église.
Merci à ces vaillants dont la bravoure n’étonne plus personne.

La Révérende Mère Supérieure, debout en face du porche de l’entrée principale,
sut demeurer dans cette fière et noble attitude jusqu’à ce que fut conjuré le danger.
Son Eminence Mgr le Cardinal Luçon,
Mgr Neveux et M. le Vicaire Général Camu s’approchèrent
et se tinrent quelques instants près d’elle.
La main du vénéré prélat se tendit à plusieurs reprises
vers celles des sauveteurs en un hommage ému!

En ces lieux dévastés, les pierres évocatrices
de tout un passé d’honneur et de vertu
attendent l’heure de la restauration,
l’aube d’une résurrection glorieuse. >>
30 juillet 1917.

L’hiver 1917-1918 fut très dur, avec le coucher dans les caves du Mont-Dieu, l
es attaques par gaz asphyxiants, les bombardements continuels.
Malgré leur héroïsme, les Rémois qui étaient restés dans la ville
prévoyaient l’évacuation générale.
Elle fut décidée pour le 25 mars 1918.
A 6 heures du matin, on apprit que l’autorité militaire
ne tolérerait plus un seul civil pour midi.
Pour les quelques reli­gieuses, qui, depuis quatre ans
défendaient pied à pied leurs murs, au péril de leur vie,
quel crève-cœur de s’éloigner et d’abandonner
à une ruine certaine le berceau de la Communauté,
le tombeau de leur vénéré Fondateur, M. Roland !

Et l’ennemi avançait toujours… Epernay, Châlons n’offraient plus de sécurité ;
il fallait émigrer plus loin…
On devine l’anxiété des Supérieures, et leurs démarches pénibles pour trouver un refuge
au Noviciat, à la Communauté, avec ses nombreuses Sœurs infirmes ou octogénaires.
La Providence vint au secours de la Révérende Mère.
M. le Marquis de Gontaud-Biron lui offrit une généreuse et cordiale hospitalité
dans son château de Courtalain, et la bonne Mère put réunir autour d’elle,
jusqu’à la fin de l’exil, toutes ses filles disper­sées.
Sa Grandeur Mgr Neveux, qui lui-même avait dû quitter Reims,
daigna leur apporter, dans cette paisible retraite, avec la joie de sa paternelle visite,
les encouragements et le réconfort qui leur étaient si nécessaires.

En exode, comme dans la zone des armées, les religieuses du Saint Enfant Jésus
mirent leur dévouement au service de l’Eglise et de la Patrie,
par l’enseignement religieux, le soin des malades, la tenue d’orphelinats,
l’œuvre d’assistance aux combattants, aux pri­sonniers, aux émigrés, etc…

Les nouvelles de la chère ville martyre étaient données bien succinctes par les journaux.
Le 29 avril, on lut cette phrase fou­droyante :
« L’immeuble de l’Enfant Jésus n’existe plus ! ».
Pour la bonne Mère Sainte Angèle, pour toutes les religieuses,
c’était le « Consummatum est », mais suivi du « Fiat » !
 

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