Vie familiale au Tchad :
Voici quelques cultivateurs.
Ici, point de remembrement ou de grandes pièces alignées !…
La houe en main (seul instrument rencontré jusqu’ici),
le cultivateur va « aérer » les rayons de coton – arbuste de 50 à 80 cm. de hauteur,
dont la fleur, rose ou blanche, rappelle celle du liseron.
Les plus avancées sont déjà en graines,
ou laissent éclater une jolie poignée de coton d’un blanc neige.
La récolte commencera en novembre.
Plus loin, au ras du sol, les arachides sont encore vertes.
Pour vous donner une idée, prenez un gros pied de trèfle un peu plus étalé.
Tirez sur la touffe, vous en sortez des racines abondantes, renflées de rhizomes.
Voilà les cacahuètes. Croquez donc ! Elles sont bien fraîches.
On croirait grignoter des haricots crus.
Il faudra donc les laisser sécher,
puis les griller, avant qu’elles ne vous arrivent.
Au fond, de très hautes tiges de deux à trois mètres
font écran et entourent de plus près le village :
c’est le mil qui constitue la nourriture de base, au Tchad.
Le plus précoce est le mil rouge qu’on voit sécher un peu partout, même sur les toits.
Le blanc se récoltera en novembre aussi.
Chaque pied donne un lourd épi de grains ronds (deux fois comme un grain de blé).
Il devra être pilé et vanné pour donner une farine granuleuse
qui servira à préparer la « boule».
On rencontre aussi quelques arbres fruitiers à la périphérie des villages :
des manguiers, goyaviers, citronniers, bananiers,
quelques palmiers-dattiers implantés du nord par les Foulbés envahisseurs.
Les légumes sont rarissimes…
Pourtant, ils poussent bien et se plaisent dans les fonds humides.
Ils demandent beaucoup de soins et d’arrosages.
(Dans le jardin de la Mission, nous avons de magnifiques tomates.
Depuis notre arrivée, François et Pierre travaillent d’arrache-pied
pour doubler le jardin, bien situé, autour du puits.
Les aubergines, les radis, salades, carottes attendent leurs soins…).
Nous poursuivons la visite et entrons au village.
De grands sekos (palissades d’herbes tressées) entourent chaque concession,
laquelle abrite toute une famille.
Une case centrale permet d’accueillir les visiteurs ou les amis.
Une autre sert de cuisine à la mère de famille,
On y dort sur une natte de feuilles de palmier tressées – étendue à même le sol.
Quand les nuits sont plus fraîches, un petit feu,
au milieu de la pièce, réchauffe les dormeurs,
mais nous donne la clef des larges brûlures
que les enfants ont fréquemment dans le dos,
parce qu’en dormant ils roulent dans la braise !
poules et poussins, canards, chèvres et moutons y font leur gîte.
Ils sont, bien souvent, la seule richesse de la famille …
Mais le plus curieux est le grenier à mil :
sorte de case étroite, en forme d’obus, ouverte à sa partie supérieure.
La femme y accède par le toit de sa case qui est caractérisée par une terrasse.
C’est souvent là qu’elle met sécher le mil avant de le rentrer.
L’homme a sa case personnelle, lui aussi.
Il a bien souvent deux ou trois femmes : c’est encore un signe de richesse.
Celles-ci sont souvent tristes, traitées en servantes, voire en esclaves…
Dans les foyers chrétiens, c’est une véritable évolution, par contre !…
On voit plus souvent la femme manger avec son mari.
Celui-ci partage plus facilement les tâches rudes ;
sa femme (unique, cette fois) est plus joyeuse, souriante et épanouie.
Leurs costumes ? « Les goûts et les couleurs !… »
parfois, une simple bande d’étoffe drapée leur sert de pagne,
mais le costume chic par excellence
se vend coupé et ajusté, « chez le tailleur » :
encolure bateau, corsage bien moulé et terminé par une longue basque ;
la jupe, toujours assortie, n’est qu’une bande drapée.
Les plus jeunes aiment s’habiller à l’européenne.
Si « dépouillés » que soient leurs costumes, jamais rien de provocant.
La simplicité est reine. Tout semble « naturel » et l’est en réalité.
Un « bout de chou » de 3 ans, que nous avons surnommé « Bouboule » (non sans motif),
se promène toujours « au naturel ».
Certains ont seulement un petit collier autour des reins.
Ils sont presque des exceptions, car les écoliers sont vêtus.
Ils portent aussi bien la chemise de nylon
que le maillot de corps – neuf ou déchiré -, qu’importe !
Les hommes sont souvent vêtus à « l’européenne ».
Mais, les jours de fête, il faut les voir,
drapés dans le grand « boubou » blanc ou bleu ciel,
et coiffés d’une chéchia ou d’une calotte multicolore !…»